Présentation issue de l’ECHO N°30 (juin 2001)
1. Historique des archives
PMF, imprégné par sa pratique de juriste, s’est montré méticuleux, attentif à la mise en ordre régulière de certains dossiers ou documents personnels, tout en faisant preuve d’un total désintérêt pour des pièces qui auraient passionné les historiens, mais qu’il fit jeter. Cette contradiction explique les lacunes et les richesses de ses archives.
Dans un premier temps, il ne conserva que ce qui le concernait très directement (journaux, affiches et tracts, lettres personnelles ou émanant de célébrités, etc.). Pendant la guerre, ses papiers furent mis à l’abri, de sorte que les Allemands ne purent pas les saisir. Dès les années trente, il avait aussi entrepris une vaste enquête généalogique et historique sur les Mendès France depuis le XVIe siècle, avec, en particulier, toutes les pièces de l’Inquisition portugaise (microfilms et leur traduction) concernant les poursuites menées contre ses ancêtres. Après sa mort, les 49 boîtes de ce fonds ont été déposées à l’Alliance israélite universelle.
Ses divers secrétariats (Louviers, Paris, Grenoble) gardaient ses correspondances et notes. Régulièrement, PMF donna l’ordre de jeter les dossiers les plus anciens, pour en réutiliser les chemises, et à cause du volume énorme qu’ils occupaient. PMF imposait en effet à ses collaborateurs de répondre dans les délais les plus brefs à chaque lettre, de quelque nature qu’elle fût et de quelque correspondant qu’elle provînt (sauf si la lettre était particulièrement injurieuse). De même, tout ordre donnait lieu à une note, qu’il s’agît de prendre un rendez-vous ou de changer une ampoule. Régulièrement, il se faisait présenter le dossier chronologique des lettres et notes ; si l’une d’entre elles n’avait pas eu de suite, il faisait relancer le « coupable » en des termes de plus en plus durs. En revanche, d’une manière générale, une lettre à laquelle on avait apporté une réponse ne l’intéressait plus. Quand une correspondance était classée, c’était donc souvent sous le mode vertical, du moins au bout d’un certain temps.
C’est au moment de son passage au gouvernement Guy Mollet, en 1956, que Pierre Mendès France constitua un fonds d’archives sur son expérience gouvernementale de 1954-1955, en faisant extraire des archives d’Etat les copies des documents jugés les plus intéressants, et en demandant à ses collaborateurs de lui remettre ceux qu’ils détenaient. Cet ensemble fut classé en dossiers thématiques qu’il enrichit par la suite pour les tenir à jour quand ils demeuraient d’actualité (cas, par exemple, des dossiers Algérie), et pour répondre aux attaques contre la politique qu’il avait menée. A partir des années soixante, PMF prêta certaines de ces pièces, habituellement déposées dans sa maison de Louviers, à des chercheurs et à des journalistes.
PMF prêta une attention grandissante au sort de ses archives à mesure qu’il se rapprocha du terme de sa vie. Ainsi récupéra-t-il des dossiers de correspondance (période 1955-1958) chez Laurence Soudet, qui les avait conservés. En 1970, il donna aux Archives départementales de l’Eure 25 liasses relatives à ses activités politiques dans ce département (3,5 mètres linéaires).
Après son décès, sa bibliothèque politique, ses 150 albums photographiques et les originaux des films le concernant sont revenus à ses fils Michel et Bernard. Marie-Claire, sa seconde épouse, a conservé les archives sonores. Les autres documents (archives, bibliothèque économique) ont été déposés à l’Institut Pierre-Mendès-France en vue de préparer les Å“uvres dites « complètes » (parues chez Gallimard). Ils y sont restés depuis lors. En 1999, M.-C. Mendès-France a donné à l’Institut l’ensemble des documents sonores et audiovisuels qu’elle détenait, et déposé 15 boîtes d’archives qu’elle avait gardées. Michel Mendès-France a exprimé le désir de donner la bibliothèque politique de son père, ainsi que les films en sa possession. Récemment, d’anciens collaborateurs ou sympathisants de PMF ont enrichi les collections de l’Institut par leurs dons : Gabriel Ardant, Pierre Avril, Georges Bourdat, Alain Gourdon, Jean Lacouture, Jacques Legré, Paul Martinet, Harris Puisais, Nicole Rodrigues, Pierre Soudet. Après leur tri par son épouse, les archives de Jean-Jacques Servan-Schreiber vont être elles aussi données à l’Institut (fort volumineuses, elles risquent néanmoins de décevoir un peu, car des pans entiers ont été perdus lors de déménagements). Le versement d’autres fonds est promis.
Depuis 1997, un reclassement général de ces archives - qui n’ont peut-être pas toujours été traitées comme elles auraient dû l’être - a été entrepris, afin notamment de restituer l’ordre voulu par PMF, et des inventaires analytiques détaillés, permettant la recherche de mots-clefs en hypertexte, sont dressés.
2. Les fonds
2. 1. Le fonds Pierre Mendès France (567 boîtes)
Pour l’instant, le fonds le plus important est de très loin celui de Pierre Mendès-France, qui demeure sous-exploité (par exemple, aucune maîtrise ou thèse n’a été consacrée à l’économiste que fut PMF !), peut-être à cause de la dénomination trompeuse des « Å“uvres complètes » parues chez Gallimard. Ces archives intéressent surtout les chercheurs travaillant sur la décolonisation, le Parti radical, l’histoire de la gauche, et, bien évidemment, sur PMF.
La bibliothèque compte environ 2 300 références (livres et littérature grise) et des revues. Sans compter les coupures de presse, les archives ont été estimées à 250 000 pages. Elles se divisent en 5 ensembles :
– le fonds sonore et audiovisuel : il est composé de disques, bandes magnétiques, films, cassettes audio et vidéo consacrés en général à PMF (inventaire, 72 p.) ; le manque de personnel limite malheureusement la collecte de nouveaux témoignages ;
– les 15 dossiers E 1 relatifs à la vie publique et privée de PMF : ils ne sont consultables que sur dérogation exceptionnelle, accordée par Michel Mendès-France ;
– les dossiers thématiques (121 boîtes) : les titres, donnés par PMF, indiquent leur contenu ; à part « Dévaluation 1948 » (2 boîtes), « Communistes » (1, sur des polémiques de 1946-1951), « Déplacements » et « Voyages » (4, périodes 1955-1957 et 1961-1962), « Discours » (7, 1932-1971), « Afrique du Nord. Gouvernement Guy Mollet » (1, 1956 ; inventorié), « Parti radical » (13, 1955-1957), « Israël-Moyen Orient » (3, 1955-1982), « Associations » (1), Grenoble (27 boîtes, 1966-1973) et « Courrier de la République » (4, sur les revues de PMF), les autres dossiers concernent son gouvernement de 1954-1955, actualisés avec des pièces postérieures à 1955 : « Cabinet » (2 inventoriés), « Indochine » (9), « Algérie » (14, inventaire en cours), « Tunisie » (5 inventoriés), « Maroc » (3 inventoriés), « T.O.M./U.F. » (2 inventoriés), « Comptoirs de l’Inde » (1 inventorié), « Grands Moulins de Dakar » (1 inventorié), « Relations internationales/Fezzan » (1 inventorié), « C.E.D. » (2), « Accords de Paris » (2), « Europe » (1 inventorié), « Atome » (1), « Défense nationale » (3), « Economie » (4), « Presse » (1), « Diffamations » (2), « Questions sociales » (1), « Affaire des fuites » (2), « Education nationale, jeunesse, sports » (1) ;
– les dossiers chronologiques et de revue de presse (149 boîtes + 63) classés par ordre chronologique, regroupent journaux et revues concernant PMF, y compris les doubles ; PMF y a parfois placé des textes de discours, quelques rapports, lettres et documents divers ;
– les dossiers correspondance (219 boîtes) se divisent en deux sous-ensembles : la « correspondance chronologique » (41 boîtes) qui comporte les pelures des lettres et notes de PMF, de juillet 1961 à octobre 1982, avec quelques lacunes et la « correspondance alphabétique » (178 boîtes) qui comprend les lettres envoyées à PMF et les réponses, classées par ordre alphabétique de destinataire (une liste a été établie, ainsi qu’environ 300 p. d’inventaires de quelques dossiers par D. Franche) ; les dossiers alphabétiques commencent en 1967-1968, à l’exception d’échanges remontant à 1955-1958 et de quelques personnalités (G. Ardant, F. Giroud, J.-J. Servan-Schreiber).
2. 2. Les fonds et dons d’anciens collaborateurs et sympathisants
– Gabriel Ardant : en cours de classement ; ce sont essentiellement les manuscrits de ses livres ;
– Pierre Avril (1 boîte) : photocopies d’un chrono concernant la revue Les Cahiers de la République (septembre 1960-juin 1962) ;
– Georges Bourdat, ancien chef de cabinet de PMF (9 boîtes) : pièces de 1955-1982 concernant notamment le gouvernement PMF, l’Algérie, la vie politique dans l’Eure (inventorié) ;
– Alain Gourdon (1 boîte) : papiers divers, en particulier des échanges de lettres du député Pierre Naudet avec PMF (1955-1956) à propos du Parti radical (inventorié) ;
– Jean Lacouture (2 boîtes) : papiers préparatoires à la biographie de PMF, avec ses remarques ;
– Jacques Legré (7 boîtes) : pièces très intéressantes sur le Parti radical à la fin des années cinquante, et sur l’itinéraire des jeunes mendésistes (inventorié) ;
– Paul Martinet, ancien secrétaire de PMF (4 boîtes) : documents comptables, notes diverses, pièces relatives aux présidentielles de 1969 ;
– Harris Puisais (5 boîtes) : documents très divers, et malheureusement très lacunaires, sur le P.S.U., la constitution de l’union de la gauche, Tribune socialiste, l’antisémitisme en U.R.S.S. (inventorié) ;
– Nicole Rodrigues (1 boîte) : concerne surtout le Parti radical en 1956-1958 et le C.A.D. (inventorié) ;
– Pierre Soudet (5 boîtes) : pièces de 1956-1957 relatives à la loi-cadre et à l’Algérie (inventorié).
3. L’accès aux fonds
Sauf dans le cas très particulier des dossiers E 1, M.-C. Mendès-France a décidé que toutes les archives sont accessibles sans autorisation particulière.
2001