Présentation issue de l’ECHO n° 41 (janvier 2004)
1. Histoire du service
« Il est nécessaire de grouper dans des documents propres au département de l’Air les enseignements tirés de l’étude de la guerre 1914-1918. La dispersion des matériaux dans la masse des archives du service historique de l’Armée est un grave obstacle à ce travail. (...) Le département de l’Air doit créer au plus tôt un organisme chargé des études historiques de l’Air où l’aviation civile et l’aviation militaire (...) puiseront de communs enseignements », écrivait en 1934 le général Denain, ministre de l’Air.
En décembre 1934 est donc créé le « Service des études historiques et géographiques de l’Air », qui succède à la section aéronautique existant depuis 1930 au sein du Service historique de l’Armée et vient par son action affermir la position d’une armée de l’Air organisée quelques mois auparavant. Trois missions lui sont alors imparties : recueillir et classer les archives de l’aéronautique militaire et de l’armée de l’Air, rédiger l’histoire de l’aviation militaire, établir des cartes aériennes. Pour ce faire, le service reçoit les archives des unités de la Première Guerre mondiale et de l’ancienne direction de l’aéronautique du ministère de la Guerre. Marquant son identité, il s’installe dès 1935 dans les locaux du ministère de l’Air, boulevard Victor, à Paris.
Après une éclipse entre 1936 et 1939, le service se reconstitue sous son nom actuel de Service historique de l’armée de l’air (SHAA) et voit ses missions archivistique et historique renforcées, au détriment de sa mission géographique qui disparaît. Son activité ne cesse pas pendant la Seconde Guerre mondiale, malgré des pérégrinations par ailleurs fort dommageables pour ses fonds d’archives. Recréé en 1945, le SHAA s’installe à l’École militaire, puis à Versailles en 1948, et enfin en 1968 au château de Vincennes, avec le Service historique de l’armée de Terre, rejoint en 1974 par celui de la Marine.
Comme les trois autres services historiques, de l’armée de Terre, de la Marine et de la Gendarmerie nationale, le SHAA est investi de trois missions : il est à la fois service d’archives, centre de recherche historique, gardien des traditions de son armée. Aujourd’hui subordonnés directement à leur chef d’état-major ou directeur, les services historiques sont en passe d’être réunis en une seule structure dépendant de l’administration centrale du ministère de la Défense.
2. Les fonds d’archives
Le Service historique de l’armée de l’Air conserve près de 13 kms linéaires d’archives. Émanant de l’État-major, de l’administration centrale, des services, bases aériennes et unités de l’armée de l’Air, ces fonds remontent au début du XXe siècle, mais ne constituent des séries cohérentes qu’à partir de la Seconde Guerre mondiale. Archives de commandement, archives techniques, journaux de marche des unités ou dossiers de personnel sont autant de documents conservés pour les besoins de l’administration, la justification des droits des personnes ou la recherche historique.
Les photographies, indissociables des archives papier, se comptent par centaines de milliers dans les fonds du SHAA. Le service conserve par ailleurs des millions de vues aériennes du territoire français et de ses anciennes colonies, résultant des missions de reconnaissance et d’observation effectuées par l’armée de l’Air depuis la fin des années trente. Des dessins, des affiches et des documents audiovisuels viennent compléter cette mémoire de l’armée de l’Air par l’image.
Née avec le service et complément indispensable des fonds d’archives qu’il conserve, sa bibliothèque est spécialisée en aéronautique civile et militaire, française et étrangère, en histoire des conflits contemporains et en géopolitique, et plus généralement en histoire du XXe siècle. Autour d’un fonds ancien, constitué à partir de celui du ministère de la Défense, elle compte aujourd’hui environ 17 000 volumes et près de 800 titres de périodiques, morts ou courants, français et étrangers, dont les journaux des bases aériennes.
La principale source d’enrichissement de ces fonds réside bien sûr dans les versements des quelque 150 services et unités de l’armée de l’air, répartis sur tout le territoire français et au-delà, notamment sur les théâtres d’interventions extérieures. Mais fonds privés, témoignages oraux, collections photographiques et créations audiovisuelles viennent régulièrement s’y ajouter.
Le Service historique de l’armée de l’Air a en effet très tôt collecté des fonds privés, indispensables pour compléter ses fonds antérieurs à 1945. Parmi les fonds entrés par voie de don, de dépôt ou d’acquisition, on relèvera le fonds d’un ministre de l’Air, Guy La Chambre, en fonction de 1938 à 1940, ou celui du général Valin, chef des forces aériennes françaises libres, puis chef d’État-major et inspecteur général de l’armée de l’Air, mais aussi des carnets de vol, des correspondances ou des souvenirs de ceux qui, quel que soit leur grade, ont appartenu à l’aéronautique militaire.
Parallèlement, une politique de collecte de témoignages oraux a été engagée au milieu des années soixante-dix par le général Christienne, chef du SHAA. Avec pour premier objectif de réunir les témoignages des acteurs des débuts de l’histoire de l’aéronautique militaire, cette politique s’est poursuivie, autour de campagnes thématiques ou auprès de personnalités choisies du monde civil ou militaire : hommes politiques, constructeurs, ingénieurs côtoient ainsi chefs d’état-major et généraux. Aujourd’hui, des campagnes sont également menées auprès du personnel des détachements envoyés en opération extérieure. Les enregistrements de 900 personnes sont ainsi proposés aux chercheurs.
Les photographies sont une autre des sources complémentaires privilégiées par le SHAA Créée en 1976, sa photothèque gère en effet près de 100 000 images, dons ou prêts émanant de personnes privées, anciens militaires pour la plupart, et offrant une vision très riche de la vie de l’armée de l’Air. Traitées de manière plus détaillée que la plupart des autres fonds photographiques entrés par versement, ces images font l’objet d’une indexation pièce à pièce, permettant des recherches par nom d’appareil, par nom de personne ou par sujet.
Les fonds audiovisuels, enfin, sont constamment enrichis par des reportages sur le terrain effectués par une équipe du SHAA, pour la réalisation d’historiques de bases ou d’unités, notamment à l’occasion de la dissolution de certaines d’entre elles.
Ces fonds, mis à disposition du public dans la salle de lecture du SHAA, au château de Vincennes, sont également mis en valeur par une politique active de publications et d’expositions destinées à les faire connaître à un plus large public. La vie quotidienne des aviateurs français et allemands de la Grande Guerre, les liens entre aéronautique et publicité, Guynemer ou encore la présence aéronautique militaire française en Afrique ont été autant de thèmes abordés par les expositions, temporaires ou itinérantes, réalisées par le SHAA Parmi ses dernières publications, on citera, en 2002, Regards sur l’aviation militaire française en Algérie, 1954-1962 : recueil d’articles et état des sources conservées par le SHAA et, en 2003, le Répertoire numérique détaillé des archives de la direction de l’infrastructure de l’Air de 1945 à 1994 (sous-série 50E).
Agnès Chablat-Beylot, 2004