L’Association des archivistes français (AAF) tient ici à apporter les précisions nécessaires à la bonne tenue du débat public, tout en affirmant avec force le rôle essentiel pour la société des archivistes et de l’institution des Archives, garants tout à la fois de l’accès aux documents et de la protection de la vie privée des individus.
Depuis leur création dans le contexte de la crise des Gilets Jaunes de l’hiver 2018-2019, les cahiers citoyens (connus dans les médias sous le nom de « cahiers de doléances ») sont régulièrement sous les feux de l’actualité. Ils sont devenus un objet polémique : le Premier Ministre a ainsi récemment déclaré vouloir puiser dans leur contenu pour inspirer son action, tandis que les oppositions accusent l’exécutif de n’en avoir rien fait. Témoins d’un moment historique, ils forment un corpus varié, d’une grande richesse informationnelle sur l’état et les aspirations de la société. Ils sont au centre des sollicitations de chercheurs désirant en mener l’étude systématique.
L’idée qu’ils seraient enterrés, enfermés, perdus, cachés aux Archives apparaît de manière récurrente. Leur versement dans les Archives rendrait l’accès à l’expression de milliers de citoyens de fait, intentionnellement, impossible.
Rappelons que ces documents constituent des archives publiques, en application du Code du patrimoine. Ouverts en mairie, à l’initiative d’associations d’élus avant que l’État n’appelle à leur tenue dans le cadre du Grand Débat national, les cahiers y étaient librement accessibles à tout un chacun. Certains maires y ont cependant adjoint des contributions individuelles à eux directement adressées, couvertes par le secret de la correspondance. Les préfectures ont ensuite concentré ces documents pour les numériser au format image. Elles ont transmis les fichiers au niveau national pour traitement et analyse des données puis ont ensuite versé aux Archives départementales les originaux papier, conformément à la réglementation. Une plateforme nationale de contribution a également été ouverte, dont les données, après traitement, ont été versées aux Archives nationales.
Loin d’être cachés (ou perdus) dans les services publics d’Archives, les cahiers citoyens, pris en charge et inventoriés par les professionnels des archives, y sont depuis accessibles dans le respect des règles de libre communicabilité : ils restent par principe immédiatement communicables, à moins que n’y aient été ajoutés des éléments relevant du délai de 50 ans protégeant la vie privée des individus (art. L. 213-2 du Code du Patrimoine). Eu égard à leur contenu sensible, toujours dans le souci de protéger la vie privée des individus et conformément aux préconisations de la CNIL, leur mise en ligne sur Internet en l’état n’est pas possible, dans la mesure où les intéressés n’ont pas donné leur consentement (au sens du RGPD), sauf à occulter manuellement les informations d’identification. Les données collectées au niveau national sont, quant à elles, consultables aux Archives nationales, dans le respect des mêmes règles.
Notons que les cahiers et documents non immédiatement communicables ne sont pas pour autant « inaccessibles ». En effet, la législation prévoit une procédure de communication par dérogation. Elle engage le demandeur qui ne peut divulguer les informations personnelles portées à sa connaissance lors de la consultation des documents dès lors qu’elles sont protégées par la loi.
regroupant, département par département, les références sous lesquelles ces documents sont conservés et, le cas échéant, le lien vers les inventaires en ligne.
Outil d’ouverture, le résultat est librement consultable, sous forme de carte ou de tableur réutilisable, sur le site de l’AAF.
Contact
Claire LARRIEUX, déléguée générale
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