Numéro de La Gazette des archives coordonné par Mathias Gardet (Université Paris 8), Jean-Philippe Legois (Archives municipales de Sevran/Cité des mémoires étudiantes) et Eliane Lochot (Archives municipales de Dijon)
« La jeunesse n’est qu’un mot » disait Bourdieu (1) . Car la jeunesse est plurielle : lycéenne, étudiante, en formation, salariée, rurale, urbaine... Car, aussi, la jeunesse est une construction sociale. Pour ne prendre que la période historique contemporaine (XIXe-XXe s.), pouvant être considérée comme l’âge d’or de l’avènement des jeunesses dans les sociétés dites développées, les contours de cet âge de la vie appelé jeunesse sont fluctuants : pour le cas français, par exemple, la majorité légale n’est passé de 21 à 18 ans qu’en 1974.
Si cet âge de la vie de chacun(e) est considéré plus particulièrement comme un statut social de transition, de l’enfance à l’âge adulte, d’aucuns ont pu le considérer comme une « plaque sensible » de toute société. Période d’initiations, d’initiatives, d’expérimentation et de formation, elle peut se caractériser par une recherche permanente d’autonomie. Cela est encore plus vrai pour les sociétés démocratiques : la question de la maîtrise, voire du « dressage », des jeunesses s’y pose de manière... sensible. En France, depuis la Libération, les politiques de jeunesses se basent sur le refus d’une mainmise étatique totale sur les mouvements de jeunesses, ce que visait le régime de Vichy. Elles se fondent sur la recherche d’autonomie des jeunes et de leurs mouvements, tout en voulant leur apporter accompagnement et pédagogie.
Il est donc important de s’assurer que nos sociétés s’organisent pour conserver les traces non seulement des politiques publiques menées envers ces jeunesses, mais aussi et surtout des actions et projets menés par ces jeunesses elles-mêmes ou par les mouvements dits de jeunes, de jeunesse et d’éducation populaire.
Car poser la question des archives de jeunesses, c’est contribuer à poser la question des « archives des futurs », des archives de projets, d’idées non-réalisés, mais dont la genèse est tout aussi intéressante que celle de projets dûment concrétisés.
Si l’on suit cette analyse de la « plaque sensible », c’est aussi poser la question du statut même de ces archives, pouvant ne pas entrer dans les cadres traditionnels des théories et pratiques archivistiques et posant, y compris dans notre secteur, la question de l’innovation et de l’expérimentation. En effet, si l’archivistique s’adapte à tout type de producteur, il serait donc logique que les archives, tout en étant toujours étymologiquement marqué par leur aspect « ancien », prennent un « coup de jeune » !
Le but de ce numéro est de regrouper des articles de chercheurs et/ou d’archivistes. Une attention particulière sera portée à la proposition de regards croisés. Les points de vue issus des jeunesses seront recherchés comme ceux issus des institutions.
Les articles sont rédigés en français. Ils sont soumis au format word. Les textes devront contenir en moyenne 3 800 mots soit 25 000 caractères espaces compris.
Les propositions d’articles peuvent être des premières versions d’article ou des résumés indicatifs, mais doivent toujours préciser les sources ou les types d’archives traités et donner quelques indications bio-bibliographiques.
(1) Entretien avec Anne-Marie Métailié, paru dans Les jeunes et le premier emploi, Paris, Association des Âges, 1978, pp. 520-530. Repris in Questions de sociologie, Éditions de Minuit, 1984. Ed. 1992 pp.143-154.