Communiqué de presse

Petite Loi pour une république numérique : oui à l’ouverture des données publiques mais sans freiner les programmes de numérisation des archives !

Paris, le 11 avril 2016 - Le conseil d’administration de l’Association des archivistes français se félicite du changement introduit par la commission des Lois du Sénat sur le projet de loi pour une République numérique, qui revient à la situation antérieure de régime dérogatoire à la publication systématique des archives numériques définitives conservées dans les services d’archives.

lundi 11 avril 2016
  • Imprimer

À la suite de l’examen du projet de loi Numérique par la com­mis­sion des lois du Sénat, l’arti­cle 4 alinéa 11 du projet de loi est rédigé de façon à ce que « les admi­nis­tra­tions men­tion­nées au pre­mier alinéa de l’arti­cle L. 300-2 ne sont pas tenues de publier les archi­ves publi­ques issues des opé­ra­tions de sélec­tion pré­vues aux arti­cles L. 212-2 et L. 212-3 du code du patri­moine. ». La com­mis­sion annule ainsi la dis­po­si­tion adop­tée en pre­mière lec­ture par les dépu­tés selon laquelle toutes les archi­ves dis­po­ni­bles sous forme électronique devaient être publiées en ligne Très loin d’une mesure de fer­me­ture des archi­ves, il s’agit sim­ple­ment là d’une mesure de bon sens.

Nous rap­pe­lons tout d’abord que le procès d’inten­tion fait aux ser­vi­ces d’archi­ves sur le manque d’accès aux res­sour­ces est nul et non avenu, comme en témoi­gne le fait que l’État et les col­lec­ti­vi­tés ont mis en ligne depuis plus de 10 ans des dizai­nes de mil­lions de docu­ments d’archi­ves et des mil­liers d’ins­tru­ments de recher­che, fai­sant des ser­vi­ces d’archi­ves qui les gèrent les ins­ti­tu­tions cultu­rel­les les plus avan­cées dans la mise à dis­po­si­tion de res­sour­ces en ligne. En dépit du contexte finan­cier de plus en plus contraint qu’elles connais­sent, les Archives et leurs tutel­les, pre­nant plei­ne­ment en compte la demande des usa­gers, pour­sui­vent d’ambi­tieux pro­gram­mes de numé­ri­sa­tion et de mise en ligne à un rythme sou­tenu (2010 : 181,5 mil­lions de pages en ligne ; 2014 : 346 mil­lions, comme en témoi­gne les rap­ports régu­liers sur le site www.archi­ves­de­france.culture.gouv.fr ).

De plus, rap­pe­lons que, dans la limite des règles léga­les de com­mu­ni­ca­bi­lité et de dif­fu­sion (notam­ment des don­nées à carac­tère per­son­nel), les archi­ves numé­ri­sées ou numé­ri­ques mais non publiées en ligne sont tou­jours acces­si­bles au citoyen sur simple demande, en local ou sous forme de copie numé­ri­que, confor­mé­ment aux dis­po­si­tions du Code des rela­tions entre le public et l’admi­nis­tra­tion.

Pour autant, la sup­pres­sion du sys­tème déro­ga­toire tel qu’il a été voté à l’Assemblée natio­nale, qui pré­voyait l’obli­ga­tion de publier en ligne toutes les archi­ves his­to­ri­ques dès lors qu’elles sont sous format numé­ri­que, fai­sait porter notam­ment aux col­lec­ti­vi­tés une charge aussi bien nou­velle que consé­quente sur les plans humain, maté­riel et finan­cier, afin d’assu­rer la publi­ca­tion de gros volu­mes de don­nées, et fra­gi­li­sait de fait la mis­sion d’accès aux docu­ments et don­nées, que nous consi­dé­rons comme pri­mor­diale.

Ainsi, si l’AAF sou­tient et sou­tien­dra toute ini­tia­tive visant à attein­dre les objec­tifs de com­mu­ni­ca­tion et valo­ri­sa­tion des archi­ves, car ce sont les buts ulti­mes de leur conser­va­tion, elle affirme qu’une sup­pres­sion éventuelle du régime déro­ga­toire aura l’effet inverse de celui visé, à savoir qu’elle les amè­nera à ralen­tir voire inter­rom­pre les pro­gram­mes de numé­ri­sa­tion d’archi­ves, faute de pou­voir en assu­rer la publi­ca­tion immé­diate.

L’AAF rap­pelle en revan­che que la numé­ri­sa­tion et la mise en ligne des archi­ves sup­po­sent qu’elles aient préa­la­ble­ment fait l’objet d’une sélec­tion qua­li­ta­tive et quan­ti­ta­tive, d’un clas­se­ment et de des­crip­tions dont les cri­tè­res, issus d’une pra­ti­que pro­fes­sion­nelle pluri-cen­te­naire, sont objec­tifs, publics et publiés (site des Archives de France, ins­truc­tions de tri et de clas­se­ment, etc.).

Ces opé­ra­tions de clas­se­ment et d’inven­taire repré­sen­tent un tra­vail consi­dé­ra­ble qui a permis les résul­tats spec­ta­cu­lai­res que nous connais­sons aujourd’hui. Or des masses d’archi­ves, notam­ment dans les fonds contem­po­rains, ne sont pas encore dotés d’ins­tru­ments de recher­che effi­cients, en dépit des efforts des pro­fes­sion­nels, et res­tent donc dif­fi­ci­le­ment acces­si­bles au public.

Les moyens humains et finan­ciers dis­po­ni­bles devraient donc prio­ri­tai­re­ment être portés sur le tra­vail d’inven­taire et sur la publi­ca­tion des ins­tru­ments de recher­che, ou encore per­met­tre de sys­té­ma­ti­ser la mise en ligne des réper­toi­res de docu­ments conte­nant des infor­ma­tions publi­ques. C’est là que nous semble se situer la pre­mière exi­gence démo­cra­ti­que, car, à notre sens, le vrai défi de notre époque numé­ri­que n’est pas de visua­li­ser la source, c’est de savoir qu’elle existe et où elle peut être consul­tée. L’AAF, qui salue la modi­fi­ca­tion appor­tée par les Sénateurs de la com­mis­sion des Lois au texte voté par l’Assemblée natio­nale, invite donc les par­le­men­tai­res à confor­ter l’équilibre exis­tant dans l’inté­rêt des poli­ti­ques de numé­ri­sa­tion, et donc du public.


A propos de l’AAF :

Fondée en 1904, l’Association des archi­vis­tes fran­çais regroupe aujourd’hui plus de 1 800 adhé­rents, pro­fes­sion­nels des archi­ves du sec­teur public comme du sec­teur privé.
Consciente du défi que repré­sente, dans le monde contem­po­rain, la maî­trise de la pro­duc­tion archi­vis­ti­que et de l’infor­ma­tion qu’elle ren­ferme, l’AAF se défi­nit comme un organe per­ma­nent de réflexions, de for­ma­tions et d’ini­tia­ti­ves mis au ser­vice des sour­ces de notre his­toire, celles d’hier comme celles de demain. L’asso­cia­tion entend en cela défen­dre les inté­rêts des pro­fes­sion­nels, pro­mou­voir le métier d’archi­viste et sen­si­bi­li­ser le grand public à l’impor­tance citoyenne des archi­ves en France mais également à tra­vers le monde.



Retour en haut de la page