Plusieurs membres du Gouvernement ont pourtant annoncé avoir l’intention de les confier à la Bibliothèque nationale de France, chargée de la mission régalienne du dépôt légal des imprimés.
Rappelons que les cahiers de doléances, produits dans le cadre du Grand Débat national lancé par le Gouvernement en réponse au mouvement des « Gilets jaunes », tenus par les mairies à la disposition des citoyen·ne·s puis remis en préfecture pour transmission à l’administration centrale de l’État, sont des archives publiques, uniques dans leur diversité et leur particularité.
L’Association des archivistes français rappelle que la destination finale de ces documents, qu’ils soient papier ou dématérialisés, ne saurait être autre que les services publics d’archives territorialement compétents, où des archivistes, professionnels de la conservation, ont pour mission depuis la Révolution de collecter les documents d’archives publiques pour les mettre à la disposition du plus grand nombre.
Les cahiers de 2019 pourront y rejoindre leurs aînés de 1789, et témoigner sur le temps long des vœux, des craintes, des colères et des aspirations populaires.
Suite à la diffusion du communiqué de presse de l’AAF, Laurence Engel, présidente de la Bibliothèque nationale de France, et Françoise Banat-Berger, cheffe du service interministériel des Archives de France, ont sollicité un droit de réponse, transmis à l’AAF le 21 février dernier :
"Les cahiers citoyens et leur copie numérique seront versés dans les services publics d’archives après leur numérisation par la BnF.
La Bibliothèque nationale de France a été sollicitée par le gouvernement dans le cadre de la mission Grand débat, comme l’expliquait notamment Sébastien Lecornu, l’un des copilotes de la mission, le 9 février dernier : « Gage de sérieux, la Bibliothèque Nationale de France se chargera de la numérisation et de la retranscription des cahiers de contributions citoyennes ouverts dans les mairies ».
En tant qu’acteur de confiance, expert en matière de traitement massif de documents hétérogènes, et habitué à assurer des prestations pour des tiers, la BnF met à la disposition du gouvernement des chaînes de production uniques et immédiatement mobilisables.
Elle garantit la rapidité et l’exhaustivité de la numérisation : elle traitera en effet les cahiers citoyens, mais aussi les courriers et contributions spontanés. Ses traitements promettent des perspectives de fouille à grande échelle, en particulier grâce à l’application de logiciels de reconnaissance de caractères aux documents dactylographiés. Enfin, par son respect de normes et standards internationaux en matière de conservation numérique, la Bibliothèque garantit la pérennité des fichiers produits. SPAR, son dispositif de conservation numérique, est agréé par le SIAF (Service Interministériel des Archives de France). Ce sont autant de gages pour le présent comme pour le futur.
L’ensemble de ces contributions constituent des archives publiques, qui portent une très forte valeur sociétale et patrimoniale. Elles doivent donc, à ce titre, être versées, en tant qu’archives définitives, pour une part dans les services départementaux d’archives et pour une part aux Archives nationales. Les versements des originaux et de leur copie numérique, seront effectués une fois les documents traités.
En outre, une copie numérique de sauvegarde sera conservée à la BnF dans le cadre d’un contrat de tiers archivage.
Laurence Engel, Présidente de la Bibliothèque nationale de France (BnF)
Françoise Banat-Berger, Directrice du service interministériel des Archives de France (SIAF)"
Si l’Association des Archivistes français ne peut que se réjouir de l’issue heureuse donnée à cette question (copie des registres citoyens assurée en général dans les préfectures, et donc versement aux Archives départementales des originaux, centralisation de l’information à la mission du Grand Débat puis versement aux Archives nationales et sauvegarde à la Bibliothèque nationale de France), elle reste persuadée de la nécessité d’avoir diffusé ce communiqué au moment où il a été diffusé, étant donné le flou qui régnait alors, et restera vigilante sur la suite des opérations.