Ce numéro de La Gazette des archives rend hommage à une figure éminente de la profession, Marie Paule Arnauld (1946-2015). Celle qui qualifiait sa carrière de « longue, fructueuse et variée » mais aussi de « relativement mouvementée » a incarné dans sa plénitude un métier tout entier voué au patrimoine : tour à tour archiviste en département et en administration centrale, directrice de deux grands établissements – le Centre historique des Archives nationales et le musée des Monuments français –, investie dans des missions de formation ainsi que dans la vie d’associations historiques et patrimoniales, elle s’est passionnée pour de nombreux aspects de ce métier, avec un regard réflexif, voire visionnaire, au niveau national et même international.
Cette publication s’est donné pour fil conducteur les points saillants du parcours de Marie-Paule Arnauld : ses chantiers de prédilection au cœur d’un réseau (« Être archiviste ») ; ses entreprises les plus significatives dans ses fonctions de chef d’importantes institutions (« Porter des projets ») ; les chemins très divers, enfin, qu’elle a entrepris d’explorer (« Élargir son horizon »). En ayant recours à un traitement à deux voix – expériences d’hier/pratiques d’aujourd’hui –, c’est en fait une représentation plus large qui est proposée sur la plupart des sujets abordés, permettant d’en appréhender les évolutions, les continuités et les ruptures. Ce temps long est l’occasion d’offrir d’intéressantes synthèses – inédites et qui feront date – sur des questions institutionnelles, scientifiques ou techniques où la part faite aux archives est prépondérante.
Un cahier de photographies, dans lequel l’officiel côtoie l’amical, restitue l’image de cette personnalité dont les qualités professionnelles et humaines ont marqué de leur empreinte toute une génération.
SOMMAIRE
– Avant-propos
Marie-Paule Arnauld
– Biographie
– Une méthode de l’exemple, par Emmanuel ROUSSEAU
– In Memoriam, par Marie-Françoise LIMON-BONNET
Être archiviste
Le cadre d’exercice
De l’École nationale du patrimoine à l’Institut national du patrimoine
– Aux origines, une archiviste engagée, par Isabelle BALSAMO
Les liens entre Marie-Paule Arnauld et l’Institut national du Patrimoine naissent dans la décennie 1990, à la faveur de deux réformes décisives pour la politique patrimoniale auxquelles elle adhère immédiatement : la création du corps unique des conservateurs du patrimoine et la fondation d’une grande école d’application, l’École du Patrimoine, devenue en 2001 l’Institut national du patrimoine. À travers sa participation aux jurys des concours, aux programmes de formation initiale et continue, ainsi que par ses mandats dans les instances scientifiques et administratives de l’établissement, elle a incarné l’excellence de la profession d’archiviste et porté une conception visionnaire du métier de conservateur.
– Une source d’inspiration, par Philippe BARBAT
La réforme de la scolarité des élèves conservateurs du patrimoine à l’Institut national du patrimoine menée en 2015-2016 part du principe que les conservateurs du patrimoine, scientifiques de haut niveau, appartiennent aussi à l’encadrement supérieur de la fonction publique et doivent donc pouvoir occuper des postes de responsabilité. Ainsi, la réforme a consisté en la création d’un module de déontologie non seulement du métier de conservateur, mais, plus généralement, de la fonction publique. Conçu en partenariat avec l’Ecole nationale d’administration, celui-ci permet notamment aux élèves de se familiariser avec les valeurs fondamentales du service public. Un module consacré à la communication a été également mis en place, et, pour les élèves de la fonction publique de l’Etat et de la ville de Paris, le temps consacré au management a été largement accru, avec un volet consacré aux techniques de négociation. Le jury de sortie, trop formel, a été remplacé par deux entretiens de fin de scolarité permettant un véritable dialogue professionnel sur les travaux scientifiques des élèves, leurs rapports administratifs et les acquis de leur scolarité.
Regards sur l’administration centrale des archives
– La restructuration de la Direction des Archives de France dans le « grand chantier » de la modernisation des archives (1994-1998), par Françoise MOSSER
En tant que chef de l’inspection générale, puis directeur du Centre historique des Archives nationales, Marie-Paule Arnauld a été étroitement associée à la « réforme des structures » engagée par Alain Erlande-Brandenburg, directeur des Archives de France de 1994 à 1998. Celui-ci a entrepris de séparer la direction de centrale et les Archives nationales – jusqu’alors placées sous l’autorité d’un directeur unique et confondues dans une même gestion – et de clarifier leurs rôles respectifs. Cette démarche de modernisation n’a pas touché seulement les Archives nationales. Elle a concerné aussi la DAF, encore régie par un organigramme qui datait de près de cinquante ans. Provoquant l’évolution de ses missions et de son organisation, le directeur a fait prendre alors à l’institution un tournant décisif pour en faire « une direction de stratégie, chargée d’orienter la politique archivistique de la nation ». Poursuivant dans la même voie, ses successeurs devaient reconnaître le bien-fondé de cette politique.
– Le droit, au cœur des activités du bureau du contrôle et de la collecte des archives publiques, par Aude RŒLLY
Le bureau du contrôle et de la collecte des archives publiques traite aujourd’hui énormément de dossiers en lien avec le droit, du fait de la nature même des archives. Une connaissance juridique fine est nécessaire tant pour la fixation des durées d’utilité administrative que pour l’accompagnement des processus de dématérialisation. Une participation active à l’élaboration des textes ayant un impact potentiel sur les archives permet de faire entendre la voix de l’administration des archives et de préserver les intérêts des services publics d’archives.
Archives et territoires
– Les archivistes au défi des réformes territoriales, par Bruno GALLAND et Élisabeth VERRY
Au cours des quatre dernières décennies, l’organisation territoriale de la France n’a cessé d’évoluer fortement. Au début des années 1980, le premier acte de la décentralisation institue aux côtés de l’Etat de nouveaux pouvoirs, ceux des collectivités territoriales, tandis que l’organisation décentralisée de la France est inscrite en 2003 dans ses principes constitutionnels. En matière archivistique, les conséquences sont nombreuses. Le nouveau statut des Archives départementales mis en place entre 1983 et 1986 cherche à faire la synthèse entre le pouvoir de l’Etat, qui conserve le contrôle scientifique et technique, et du Département, qui assure la gestion des services et leur confèrent leurs moyens. La décentralisation fait également émerger un nouveau type de service d’archives, celui des régions. Mais les fluctuations nombreuses des mesures d’aménagement du territoire fragilisent la collecte et la conservation des archives territoriales, notamment celles des structures intercommunales. Au cours de la dernière décennie, l’organisation territoriale de la France est à nouveau profondément bouleversée. Le pilotage de l’action de l’État au niveau régional a été affirmé ; une série de propositions élaborées depuis 2007 ont conduit à renforcer les régions et les intercommunalités au détriment des départements. Les archivistes sont directement concernés par ces évolutions. Les services régionaux d’archives doivent s’adapter au regroupement des régions. La charge des Archives départementales des départements chefs-lieux de région se trouve accrue par la nouvelle organisation des services de l’État, et on peut s’interroger sur la réaction à moyen et long terme des conseils départementaux concernés, qui voient parallèlement leurs compétences et leurs ressources s’éroder au profit notamment des intercommunalités. À cet égard, l’exemple du service unifié des Archives du département du Rhône et de la métropole de Lyon est intéressant, même s’il est d’abord lié au statut spécifique de cette métropole. Dans le même temps, la révolution numérique, qui invite à la mutualisation, conduit à repenser le schéma traditionnel d’une conservation « physique » dans les territoires de données produites au niveau ministériel.
Au cœur du métier
Le contrôle scientifique et technique
– Le contrôle scientifique et technique : comment comprendre son utilité ? , par Geneviève ÉTIENNE
Instauré pour garantir l’accès de tous aux archives, le contrôle scientifique et technique n’a cessé d’évoluer et d’élargir son champ d’intervention afin de s’adapter aux changements institutionnels et sociétaux et aujourd’hui à l’archivage numérique. Plus que jamais, contrôle sur place et contrôle sur pièces doivent se conjuguer avec des outils réglementaires, méthodologiques, normatifs et avec une assistance à la mise en œuvre de ces outils.
– Du contrôle scientifique et technique dans un monde mouvant, par Nathalie ROGEAUX
Les réformes incessantes, la remise en cause du cadre départemental, le contexte toujours plus délicat en termes d’immobilier et de ressources humaines dans les administrations peuvent paraître constituer autant d’obstacles à l’exercice du contrôle scientifique et technique. Cependant, ces contraintes peuvent aussi être l’occasion d’une approche renouvelée de cette tâche, où les conseils et les compétences de l’archiviste, notamment en matière numérique, trouvent un nouvel écho.
La description archivistique
– Marie-Paule Arnauld et les instruments de recherche : trente années de compagnonnage, par Christine NOUGARET
Que ce soit comme conservateur d’archives, archiviste départementale, inspectrice des Archives de France, directrice des Archives nationales ou du Musée des monuments français, Marie-Paule Arnauld a témoigné tout au long de sa carrière d’un très grand intérêt pour les instruments de recherche, qu’il s’agisse d’en rédiger elle-même, d’en assurer la direction, de délivrer le visa avant publication ou bien encore de promouvoir les normes de description ou d’encodage, en France comme à l’étranger. Ses réalisations en la matière témoignent de son souci constant d’offrir aux chercheurs les outils scientifiques requis et au grand public les instruments de médiation indispensables.
– D’hier à aujourd’hui : les évolutions de la description archivistique, par Claire SIBILLE-DE GRIMOÜARD
Si les quatre normes élaborées par le Conseil international des archives ont permis peu à peu d’harmoniser les pratiques d’élaboration des instruments de recherche, une des questions essentielles aujourd’hui réside dans leur articulation les unes avec les autres et les conséquences que cette articulation est susceptible d’entraîner sur les pratiques des archivistes et leur vision de la description archivistique. Un projet en cours vise donc à élaborer un modèle conceptuel de données réconciliant et harmonisant les quatre normes internationales développées depuis le début des années 1990. L’enjeu est d’adapter les descriptions archivistiques traditionnelles à l’évolution des pratiques de recherche et des technologies du Web sémantique.
Publics et médiation
– Le public et l’archiviste, par Martine CORNÈDE
La loi du 7 messidor an II donnait aux archivistes un public, restreint au départ (quelques érudits, les universitaires) et élargi aux généalogistes dès 1980. Les archivistes s’adaptent à ces publics successifs, passant d’une certaine méfiance à la volonté de former leurs lecteurs dès l’école (création des services éducatifs) et à une politique destinée à attirer un public plus large (cycles d’expositions, ateliers d’histoire, journées portes ouvertes). À chaque moment de cette évolution, les archivistes montrent un réel souci de trouver des réponses appropriées, avec une réflexion permanente sur la rédaction des instruments de recherche et avec l’intégration dans les nouveaux bâtiments de locaux d’accueil plus agréables et plus spacieux. Le public est en fait une sorte d’aiguillon permanent pour l’archiviste, sa satisfaction passant par la mise en place d’une politique scientifique et culturelle comprenant des programmes de collecte, de classement, d’informatisation, de microfilmage, de numérisation, de restauration et de mise en ligne. Nul n’imaginait, en effet, les bouleversements qu’allait introduire le développement des autoroutes de l’information. À un public quasi-virtuel dont les ressources sont devenues immenses, l’archiviste doit, pour le satisfaire, répondre rapidement avec des renseignements précis et de qualité.
Suivi d’une bibliographie succincte sur les publics des archives depuis la fin du XXe siècle
– Les Archives nationales ou la tradition de l’audace, par Ariane JAMES-SARAZIN
Dès le Second Empire, les Archives nationales ont lié de manière indissociable l’action culturelle et éducative à l’exercice de leurs missions fondamentales. Quelle que soit la forme qui fut privilégiée et dans laquelle il s’incarna, cet impératif chemina tel un fil conducteur d’un directeur à l’autre. Après les années décisives de l’après-guerre durant lesquelles Charles Braibant, secondé par Régine Pernoud, jeta les fondements du premier service éducatif des Archives, mais également d’une politique d’expositions temporaires et d’activités variées à destination du grand public, l’enjeu que constituait la réappropriation par tous de l’institution et de son patrimoine, tant architectural qu’historique et documentaire, trouva en Marie-Paule Arnauld une interprète convaincue et passionnée.
– Archivistes, tous médiateurs ? Petites réflexions sur les pratiques professionnelles, par Anne-Catherine MARIN
Initialement définie dans le cadre de la “ démocratisation culturelle ”, aussi en lien avec “ la politique de la Ville ”, l’expression médiation culturelle est aujourd’hui couramment employée pour caractériser le renouvellement des pratiques professionnelles de valorisation culturelle. Processus de transmission et d’appropriation, elle apparaît comme un impératif social et politique, entre demandes des élus, objectifs des archivistes et attentes des individus. La médiation culturelle, qui traverse de nombreuses pratiques dans le champ culturel, mais aussi dans le domaine social, le monde de l’éducation, les loisirs, utilise des modes d’action en perpétuel renouvellement pour répondre au mieux aux attentes d’une société en constante évolution et investit l’environnement numérique. La valorisation des archives se rapproche désormais de celle des autres institutions culturelles, bibliothèques ou musées.
– Les activités éducatives dans les archives, entre bilan et perspectives, par Brigitte GUIGUENO
L’offre proposée par les services d’archives en direction des scolaires se déploie de façon multidirectionnelle, du point de vue des lieux investis, des sujets abordés et des supports utilisés. D’une qualité remarquable, elle s’adresse en priorité aux collégiens et aux primaires, avec une hausse de fréquentation ces dernières années qui masque cependant d’importantes disparités. La complémentarité entre le professeur-relais, élément-clé du service éducatif, et les agents des Archives impliqués dans les activités pédagogiques se révèle essentielle pour un bon fonctionnement. La principale perspective de développement – outre l’insertion dans les dispositifs en place (EAC, politique culturelle locale) et le recours aux partenariats – consiste dans un usage performant du multimédia et de l’interactivité. La médiation reste un point délicat, qui laisse pour l’instant cette supériorité à l’accueil in situ. Mais les deux formes d’accueil – sur place et sur internet – ne doivent pas être envisagées comme concurrentes mais comme complémentaires, surtout dans un contexte plus contraint en moyens.
Porter des projets
– Le Centre historique des Archives nationales au défi du « projet Pierrefitte » : genèse et ambition de la refondation des Archives nationales (1998-2009), par Isabelle NEUSCHWANDER
Lorsque Marie-Paule Arnauld prend la direction du Centre historique des Archives nationales (CHAN) en mars 1998, elle est à la tête d’un service qui occupe une place spécifique dans le paysage archivistique français et bénéficie d’une expertise scientifique et technique exceptionnelle mais qui n’a pas de statut administratif et est en crise quasi permanente. La parution du rapport de Philippe Bélaval « Pour une stratégie d’avenir des archives » et les réformes internes permettent la naissance d’un espoir et une mobilisation inédite des chefs de service du CHAN. Cette mobilisation débouche en 2001 sur la création de l’association « Une cité pour les Archives nationales » pour porter dans le débat public la voix réunie des archivistes et des chercheurs. Conjointement, l’action déterminée de Martine de Boisdeffre, directrice des Archives de France de 2001 à 2009, permet l’obtention en mars 2004 de la décision politique de construction d’un nouveau bâtiment et l’attribution en décembre 2006 d’un statut pour les Archives nationales : celui de service à compétence nationale. Mais le bâtiment et le statut administratif sont avant tout des outils au service de la refondation globale des Archives nationales et tel est l’objectif du « projet Pierrefitte ». Cette refondation s’appuiera sur une très forte concertation et sur la construction d’ un projet commun à partir du partage des savoirs et des compétences présents sur les sites de Fontainebleau et de Paris et sur des fondamentaux, tels que le rétablissement de la chaîne archivistique, l’affirmation du principe de respect des fonds et du lien fonds/producteurs, la priorité donnée à l’accessibilité des fonds et à la demande du public, l’unité de fonctionnement entre les sites. Ces fondamentaux ont guidé la conception et la mise en œuvre de chantiers scientifiques d’ampleur, interconnectés avec le chantier de construction, la mise en place d’une organisation porteuse de sens, la projection de l’institution dans un projet scientifique, culturel et éducatif. L’ensemble a donné au « projet Pierrefitte » une force et une cohérence tout à fait particulières et a constitué un défi d’ampleur pour les équipes en place. Parmi l’histoire des grands travaux culturels, le projet Pierrefitte peut ainsi être étudié à la lumière de sa genèse et de son ambition.
– La conservation : naissance d’un département aux Archives nationales, par Marie-Claude DELMAS
En 1998, Marie-Paule Arnauld est chargée de mettre en œuvre la création d’un département de la conservation au sein du centre parisien des Archives nationales. Ce service apparaît comme une nouveauté, mettant les Archives nationales au rang des grandes institutions patrimoniales internationales qui entrent dans l’ère du développement durable. Pourtant il ne s’agit pas réellement d’une innovation car la tradition des Archives nationales montre que, depuis l’origine, les conditions de conservation ont été un souci majeur de leurs directeurs. L’article décrit les étapes de cette histoire en insistant sur les résultats de la réforme menée sous la conduite de Marie-Paule Arnauld et de ses successeurs.
– Marie-Paule Arnauld et la renaissance du musée des Monuments français, par Corinne BÉLIER
Marie-Paule Arnauld a dirigé le musée des Monuments français à un moment décisif de son l’histoire, de 2004 à 2007. Ces années ont été celles des débuts de la Cité de l’architecture et du patrimoine, dans laquelle le musée a été intégré : organisation de l’établissement et de ses équipes, vaste chantier portant sur le palais de Chaillot, sur la muséographie et sur les collections, conception de la programmation culturelle future. En septembre 2007, après dix ans de fermeture, le musée des Monuments français a rouvert ses portes au sein de la plus importante institution française dédiée à l’architecture et au patrimoine, avec des collections restaurées et étendues, une muséographie transformée et modernisée. Aux côtés du président d’établissement, Marie-Paule Arnauld a porté la renaissance du musée des Monuments français et préparé son avenir.
Élargir ses champs d’action
L’Association des archivistes français, reflet de l’évolution du métier
– L’Association des archivistes français dans les années 1970 : vers l’indépendance, par Rosine CLEYET-MICHAUD
Les années 1970 ont été, au sein de l’Association, des années de profondes mutations. Le résultat de ces mutations s’est manifesté tout d’abord à travers l’évolution des statuts. Ainsi l’Association amicale professionnelle des archivistes français de 1968, de caractère corporatif, se transforma peu à peu jusqu’à devenir une véritable association professionnelle, de caractère technique, avec ses sections, ses groupes régionaux, ses journées d’études et son centre de formation.
– Au fil des éditos, 30 ans de vie de l’Association des archivistes français, par Pierre-Frédéric BRAU et Alice GRIPPON
De l’histoire locale à la micro-histoire
– Archives en Limousin, par Hélène SAY
L’association Archives en Limousin est la rencontre de deux personnalités passionnées – Marie-Paule Arnauld et Bernadette Barrière – et de deux types d’institutions – les Archives et l’université, en 1991. La revue éponyme, devenue très vite semestrielle, conserve son objectif d’origine : diffuser l’actualité liée aux archives et à la recherche pour créer une dynamique de collaboration autour de la valorisation des fonds. Un esprit d’équipe se forgea dès le départ, qui explique en partie la résistance collective aux aléas individuels. Aujourd’hui l’association poursuit sa mission, en s’adaptant avec une belle vitalité aux attentes et aux pratiques contemporaines.
– Les Archives départementales, quelle place dans l’histoire locale ? Retour sur l’expérience de la Seine-Maritime, par Vincent MAROTEAUX
En Seine-Inférieure (devenue depuis la Seine-Maritime), les Archives départementales se sont depuis longtemps investies dans le développement de l’histoire locale. En témoigne l’implication de la plupart des archivistes départementaux au sein des sociétés savantes locales, à l’exemple de Charles de Robillard de Beaurepaire, premier chartiste nommé à la tête du service en 1851.
Les publics se sont aujourd’hui élargis, les charges se sont alourdies, avec des exigences croissantes des collectivités départementales quant à l’ouverture vers les populations et à l’animation du territoire. Au-delà de la mise à disposition des sources, que le numérique a révolutionnée, ou de la médiation à leur utilisation, les Archives départementales gardent de multiples possibilités de développer une offre historique (expositions et publications associées, journées d’études ou colloques, revue, publications en ligne…). Elles ont tout intérêt pour cela à développer des partenariats avec le réseau associatif, avec les universités, mais aussi avec d’autres services d’archives ou institutions culturelles, sans hésiter à dépasser le cadre départemental.
L’action internationale
– Du CIA au PIAF : un demi-siècle de coopération internationale, par Élisabeth GAUTIER-DESVAUX
Le demi-siècle inscrit entre la fin de la seconde guerre mondiale et l’aube des années 2000 voit se développer une véritable effervescence archivistique internationale dans laquelle la France joue un rôle moteur aux côtés du Conseil international des archives, à travers quelques personnalités emblématiques comme Charles Braibant ou Jean Favier et des réalisations saillantes telles que le Stage technique international d’archives et les congrès internationaux des archives. Marie-Paule Arnauld, chef de l’Inspection générale des Archives de France chargée des relations internationales à compter de 1995, contribue à cette coopération par son esprit d’ouverture qui lui permettra de discerner, parmi les enjeux multiformes découlant de l’évolution politique et technique du paysage archivistique mondial, les pistes susceptibles de renouveler l’offre de formation et d’échange d’expériences, telle que le Portail international archivistique francophone impulsé par Gérard Ermisse et Marcel Caya.
– La genèse du Portail international archivistique francophone (PIAF) , par Marcel CAYA et Gérard ERMISSE
Rédigé par les deux initiateurs du projet de Portail international archivistique francophone imaginé à partir de 1998 en réaction à l’emprise culturelle anglophone au sein des instances internationales de coopération professionnelles, cet article retrace la genèse rapide et le développement de cet outil majeur de formation et d’information encore très vivant qu’est le PIAF aujourd’hui. Chaque étape et chaque contribution financière, technique et scientifique, sont précisées pour que trace soit gardée de l’intervention de tous ceux et celles qui ont permis la mise sur pied de ce grand projet archivistique entre 1998 et aujourd’hui. La suite de l’aventure étant assumée par Didier Grange et son équipe. Sans pouvoir citer individuellement les noms de tous les auteurs de modules, des ingénieurs informaticiens et autres collaborateurs, les auteurs rendent hommage aux décideurs principaux à la tête de l’INTIF, du CIA, des Archives de différents pays et à l’AIAF, porteur d’un projet complexe à monter de 600 000 euros. Les principales étapes de Paris (2001), Tunis (2002 et 2005) et Vienne (2004) sont évoquées. Enfin, la conclusion s’attache à pointer l’importance politique du PIAF pour le monde des archives, qui s’est vu ainsi reconnaître le rôle de facteur de développement de la société globale qui est la nôtre désormais, avec ses exigences démocratiques et d’ouverture de droits nouveaux pour les citoyens. Ceci vaut aussi bien pour les pays du Nord que du Sud : chacun d’eux et surtout chaque archiviste, y compris le plus isolé, s’il dispose d’Internet, retire ainsi avantage de la coopération mise en œuvre grâce aux TIC, véritable révolution qui a permis la naissance du PIAF.
– Le PIAF, entre actualité et projets d’avenir, par Caroline BECKER et Didier GRANGE
Le Portail international archivistique francophone (PIAF) a fait l’objet dans le courant de l’année 2015-2016 d’une refonte en profondeur. Le nouveau site est en ligne depuis le 27 avril 2016. Outre les transformations rendues nécessaires par l’évolution de la technologie, ce travail a donné lieu à des réflexions sur la pertinence des contenus et les usages des internautes du PIAF. Dans le produit final, l’accent a été porté sur les besoins de l’archiviste contemporain. Le volet « Se documenter » – ou boîte à outils de l’archiviste – a été considérablement enrichi ; les cours ayant trait au numérique ont été déployés. L’AIAF (Association internationale des archivistes francophones) a fixé dans un plan stratégique pour les années 2016-2020 les nouveaux défis du PIAF. Ils sont nombreux ! Leur réalisation repose sur l’engagement du comité de pilotage du PIAF mais aussi de toute la communauté des archivistes francophones.
Les sociétés savantes : un engagement militant
– Une décennie au service de la Société française d’archéologie, par Isabelle CHAVE et Christian PATTYN
Avec le sérieux et l’engagement d’une administratrice et la disponibilité communicative d’une personnalité chaleureuse et charismatique, Marie-Paule Arnauld a, dix ans durant, mis véritablement sa passion pour le patrimoine architectural au service de la Société française d’archéologie (SFA). Fondée en 1834 par Arcisse de Caumont, la première mission de la SFA fut la découverte et la sauvegarde d’un patrimoine architectural alors en grand péril. L’esprit qui anime aujourd’hui cette association dédiée à l’étude et à la valorisation du patrimoine monumental reste celui des débuts pionniers : diffuser la connaissance à travers des publications scientifiques de haut niveau. Christian Pattyn, ancien président (2005-2011), et Isabelle Chave, ancienne secrétaire générale (2012-2015), reviennent sur ces années durant lesquelles, en qualité de secrétaire générale (2006-2011), puis de présidente (2012-2015), Marie-Paule Arnauld a conduit les destinées de cette association reconnue d’utilité publique, réunissant avec originalité professionnels du patrimoine et amateurs éclairés.
Annexes
– Bibliographie de Marie-Paule Arnauld, par Françoise MOSSER
– Relire Marie-Paule Arnauld
* Quelques réflexions tirées d’une carrière de conservateur
* Les archives dans leur réalité
* Les archives orales, le point de vue d’un conservateur