Vous trouverez également ce texte en ligne sur le site du Conseil international des Archives, avec des traductions en anglais, espagnol, grec, italien, hongrois, etc.
Préambule
A.
Un code de déontologie des archivistes a pour ambition de fournir à la profession archivistique des règles de conduite de haut niveau.
Il devrait sensibiliser les nouveaux membres de la profession à ces règles, rappeler aux archivistes expérimentés leurs responsabilités professionnelles et inspirer au public confiance dans la profession.
B.
Le terme « archiviste », tel qu’il est utilisé dans ce texte, s’applique à tous ceux dont la responsabilité est de contrôler, prendre en charge, traiter, garder, conserver et gérer les archives.
C.
Les organismes employeurs et les services d’archives sont encouragés à adopter des politiques et des pratiques permettant l’application de ce code.
D.
Ce code est destiné à fournir un cadre éthique de conduite aux membres de la profession et nullement à offrir des solutions spécifiques à des problèmes particuliers.
E.
Tous les articles sont accompagnés de commentaires développant et illustrant le principe énoncé ; articles et commentaires forment un tout et constituent ainsi le texte complet du code.
F.
La mise en oeuvre du code dépend de la bonne volonté des institutions d’archives et des associations professionnelles. Elle peut se faire par le biais de la formation et de la mise en place de procédures pour suggérer des orientations dans les cas de doute, examiner les conduites contraires à l’éthique, et, si besoin est, d’appliquer des sanctions.
Code
1.
Les archivistes maintiennent l’intégrité des archives et garantissent ainsi qu’elles constituent un témoignage du passé durable et digne de foi.
Le devoir premier des archivistes est de maintenir l’intégrité des documents qui relèvent de leurs soins et de leur surveillance. Dans l’accomplissement de ce devoir, ils considèrent les droits, parfois discordants, et les intérêts de leurs employeurs, des propriétaires, des personnes citées dans les documents et des usagers, passés, présents et futurs. L’objectivité et l’impartialité des archivistes permettent de mesurer leur degré de professionnalisme. Les archivistes résistent à toute pression, d’où qu’elle vienne, visant à manipuler les témoignages comme à dissimuler ou déformer les faits.
2.
Les archivistes traitent, sélectionnent et maintiennent les archives dans leur contexte historique, juridique et administratif, en respectant donc leur provenance, préservant et rendant ainsi manifestes leurs interrelations originelles.
Les archivistes agissent en conformité avec les principes et les pratiques généralement reconnus. Dans l’accomplissement de leur mission et dans leurs fonctions, les archivistes se conforment aux principes archivistiques régissant la création, la gestion et le choix de la destination des archives courantes et intermédiaires, la sélection et l’acquisition de documents en vue de leur archivage définitif, la sauvegarde, la préservation et la conservation des archives dont ils ont la charge, et le classement, l’analyse, la publication et les moyens de rendre les documents accessibles. Les archivistes trient les documents avec impartialité, en fondant leur jugement sur une profonde connaissance des exigences administratives et des politiques d’acquisition de leurs institutions. Ils classent et analysent les documents choisis pour être retenus en accord avec les principes archivistiques (en particulier le principe de provenance et le principe du classement d’origine) et les normes universellement reconnues, et ce aussi rapidement que possible. Les archivistes ont une politique d’acquisition de documents conforme aux objectifs et aux ressources de leurs institutions. Ils ne recherchent pas ou n’acceptent pas des acquisitions, lorsque celles-ci constituent un danger pour l’intégrité ou la sécurité des documents ; ils veillent à coopérer pour que les documents soient conservés dans les services les plus appropriés. Les archivistes favorisent le rapatriement des archives déplacées.
3.
Les archivistes préservent l’authenticité des documents lors des opérations de traitement, de conservation et d’exploitation.
Les archivistes font en sorte que la valeur archivistique des documents, y compris les documents électroniques ou informatiques, ne soit pas diminuée par les travaux archivistiques de tri, de classement et d’inventaire, de conservation et d’exploitation. S’ils doivent procéder à des échantillonnages, ils fondent leur décision sur des méthodes et des critères sérieusement établis. Le remplacement des originaux par d’autres supports est décidé en considérant leurs valeurs légales, intrinsèques et d’information. Lorsque des documents exclus de la consultation ont été retirés momentanément du dossier, ils le font savoir à l’usager.
4.
Les archivistes assurent en permanence la communicabilité et la compréhension des documents.
Les archivistes conduisent leur réflexion sur le tri des documents à conserver ou à éliminer, prioritairement en fonction de la nécessité de sauvegarder la mémoire de l’activité de la personne ou de l’institution qui les a produits ou accumulés, mais également en fonction des intérêts évolutifs de la recherche historique. Les archivistes sont conscients que l’acquisition de documents d’origine douteuse, même de grand intérêt, est de nature à encourager un commerce illégal. Ils apportent leur concours à leurs collègues et aux services compétents pour l’identification et la poursuite des personnes suspectées de vols de documents d’archives.
5.
Les archivistes répondent du traitement des documents et en justifient les modalités.
Les archivistes ne se préoccupent pas seulement de la collecte des documents existants, mais aussi coopèrent avec les gestionnaires de documents de façon à ce que, dans les systèmes d’information et d’archivage électronique, soient prises en compte dès l’origine les procédures destinées à la sauvegarde des documents de valeur permanente. Les archivistes, quand ils négocient avec des services versants ou des propriétaires de documents, fondent leur décision, le cas échéant, sur tous les éléments suivants : autorisations de versement, de donation ou de vente ; arrangements financiers ; plans de traitement ; droits de reproduction et conditions de communicabilité. Ils gardent une trace écrite des entrées de documents, de leur conservation et traitement.
6.
Les archivistes facilitent l’accès aux archives du plus grand nombre possible d’utilisateurs et offrent leurs services avec impartialité à tous les usagers.
Les archivistes produisent les instruments de recherche généraux et spécifiques adaptés aux exigences, et ce pour la totalité des fonds dont ils ont la garde. Ils fournissent en toutes circonstances des conseils avec impartialité, et utilisent les ressources disponibles pour fournir une série de prestations équilibrées. Les archivistes répondent avec courtoisie, et avec le souci d’aider, à toutes les recherches raisonnables portant sur les documents dont ils assurent la conservation, et encouragent leur usage par le plus grand nombre dans les limites posées par la politique des institutions dont ils dépendent, la nécessité de préserver les documents, le respect de la législation, de la réglementation, des droits des individus et des accords avec les donateurs. Ils motivent les restrictions aux éventuels demandeurs, et les appliquent avec équité. Les archivistes découragent les limitations d’accès et d’utilisation des documents quand elles sont déraisonnables, mais peuvent accepter voire suggérer des restrictions clairement définies et d’une durée limitée quand elles sont la condition d’une acquisition. Ils observent fidèlement et appliquent avec impartialité tous les accords passés au moment d’une acquisition, mais, dans l’intérêt de la libéralisation de l’accès aux documents, ils peuvent renégocier les clauses quand les circonstances changent.
7.
Les archivistes visent à trouver le juste équilibre, dans le cadre de la législation en vigueur, entre le droit au savoir et le respect de la vie privée.
Les archivistes veillent à ce que la vie des personnes morales et des individus, ainsi que la sécurité nationale soient protégées sans qu’il soit besoin de détruire des informations, surtout dans le cas des archives informatiques où l’effacement des données et la réinscription sont pratique courante. Les archivistes veillent au respect de la vie privée des personnes qui sont à l’origine ou qui sont le sujet des documents, surtout pour celles qui n’ont pas été consultées pour l’usage ou le sort des documents.
8.
Les archivistes servent les intérêts de tous et évitent de tirer injustement de leur position des avantages pour eux-mêmes ou pour quiconque.
Les archivistes s’abstiennent de toute activité préjudiciable à leur intégrité professionnelle, à leur objectivité et à leur impartialité. Les archivistes ne tirent de leurs activités aucun avantage personnel, financier ou de quelque autre ordre qui pourrait être au détriment des institutions, des usagers et de leurs collègues. Les archivistes ne collectionnent pas de documents originaux ni ne participent à un commerce de documents pour leur compte. Ils évitent les activités qui pourraient créer dans l’esprit du public l’impression d’un conflit d’intérêt. Les archivistes peuvent exploiter les fonds d’archives de leur institution à des fins de recherches et de publications personnelles, pourvu qu’un tel travail soit mené selon les mêmes règles que celles imposées aux autres usagers. Ils ne révèlent ni n’utilisent les informations qu’ils ont pu obtenir par leur travail dans les fonds d’archives dont l’accès est limité. Ils ne permettent pas que leurs recherches personnelles ou leurs publications interfèrent avec les missions professionnelles ou administratives pour lesquelles ils sont employés. En ce qui concerne l’exploitation de leurs fonds d’archives, les archivistes n’utilisent pas leur connaissance des découvertes faites par un chercheur, et qu’il n’aurait pas encore publiées, sans l’avertir au préalable de leur intention d’en tirer parti. Les archivistes peuvent critiquer et commenter les travaux proches de leurs domaines de recherches, y compris les travaux inspirés des fonds dont ils ont la garde. Les archivistes ne permettent à personne d’extérieur à leur profession de s’immiscer dans leurs pratiques et obligations.
9.
Les archivistes cherchent à atteindre le meilleur niveau professionnel en renouvelant systématiquement et continuellement leurs connaissances archivistiques et en partageant les résultats de leurs recherches et de leur expérience.
Les archivistes s’efforcent de développer leur savoir professionnel et leurs connaissances techniques, de contribuer aux progrès de l’archivistique, et de veiller à ce que les personnes qu’il leur appartient de former et d’encadrer exercent leurs tâches avec compétence.
10.
Les archivistes travaillent en collaboration avec leurs collègues et les membres des professions voisines afin d’assurer universellement la conservation et l’exploitation du patrimoine documentaire.
Les archivistes cherchent à stimuler la collaboration et à éviter les conflits avec leurs collègues, en résolvant les difficultés par l’encouragement à respecter les normes archivistiques et l’éthique professionnelle. Les archivistes coopèrent avec les représentants des professions parallèles dans un esprit de respect et de compréhension mutuelle.